Auteur: David Bouchet
roman, septembre 2015, La Peuplade, 318 pages
Le jeune Souleye et sa famille ont émigré du Sénégal vers le Québec. Il y a avant, il y a maintenant, et comment vivre dans un nouveau pays sans se retourner. Le parcours de l’immigrant est souvent difficile et complexe. Pour un immigrant de couleur, noir en particulier, c’est un défi encore plus grand. Parvenir à arriver au nouveau pays constitue en soi un exploit. Puis, cela commence par la location d’un appartement, l’achat du strict nécessaire, la recherche d’un travail, d’une école pour les enfants, etc. Que dire des hivers au Québec qui ne sont déjà pas faciles pour les gens d’ici ? Ce livre raconte la vie d’une famille sénégalaise, les obstacles et les petites joies dans le combat quotidien. La grave dépression du père est ressentie par toute la famille et plus particulièrement par le jeune Souleye, le « Docteur N° 1 » du père. Charlotte, la jeune fille d’en face vit une tragédie auprès de sa mère droguée et alcoolique. Charlotte et Souleye, les deux jeunes voisins vont s’épauler dans cette vie de misère. La mère de Souleye devient le pilier de la famille, on reconnaît la femme africaine dans toute sa force séculaire, comme les femmes de la Nouvelle-France.
Je recommande la lecture de ce livre, parce qu’il nous fait comprendre le parcours difficile des immigrants d’Afrique ou d’ailleurs, parce qu’il ce qu’il nous ouvre les yeux sur les autres, d’ici ou venus de divers horizons. Les gens qui connaissent un peu l’Afrique ou le Sénégal retrouveront avec grand plaisir tous ces mots, expressions de la sagesse africaine, la joie de vivre, la culture, les relations sociales et en contrepoint la société nouvelle, avec ses caractéristiques, ses qualités et ses surprises bonnes ou mauvaises.
L’histoire est rugueuse, mais ce jeune Souleye, d’une étonnante maturité, permet à l’auteur de passer des sentiments de réconfort, des lumières d’espoir. Nous sommes en constante réflexion sur deux continents, deux sociétés, comme dans la vie de l’immigrant. Sauver le père ? Sauver Charlotte, sa mère ? Entre ceux d’ailleurs venus ici au prix d’énormes sacrifices et pleins d’espérance, et ceux d’ici, malpris et tout aussi étrangers dans la société, que de convergences dans la souffrance. À lire ? Bien sûr ! À réfléchir, à partager.
Les observations de l’auteur sur les deux sociétés et ses phrases de grande sagesse africaine de l’enfant sont un pur bonheur. Ce live serait triste s’il n’était habité par la joie de vivre, reflet de la joie de vivre malgré tous les problèmes de beaucoup d’Africaines et Africains, où qu’ils soient dans le monde. Il y a aussi dans ce livre des perles d’humour typiquement sénégalais, des réflexions profondes, glissées doucement, en passant.
Ce livre mériterait d’être porté à l’écran. David Bouchet a déjà fait ses preuves avec La Pirogue, on lui souhaite le succès, il le mérite et on souhaite surtout à nos sœurs et frères d’Afrique de trouver le soleil dans le cœur des gens qu’ils rencontrent, ici ou ailleurs.
Jean-Louis Grosmaire
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